Deux ans déjà

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Research Publishing
By: Magdalena Skipper, Thu Feb 3 2022
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Author: Magdalena Skipper

Editor in Chief, Nature

Il y a deux ans déjà, Nature publiait son premier article sur ce que nous connaissons aujourd'hui sous le nom de SARS-CoV-2. Cet article était particulièrement important : il décrivait la séquence du génome d'un virus associé à l'épidémie de maladie respiratoire apparue en Chine, isolé chez un patient. Les auteurs qui ont porté ce travail essentiel à notre connaissance ont également partagé ouvertement les données sous-jacentes avec la communauté des chercheurs, changeant ainsi le cours de ce que l'OMS allait déclarer comme une pandémie un mois plus tard. Le séquençage du génome a été la première étape sur la voie de la connaissance de la biologie de ce nouveau virus et une condition préalable essentielle à la détermination de la structure des particules virales, qui est elle-même la clé pour le développement de vaccins et de thérapies.

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Nous sommes reconnaissants aux milliers de chercheurs du monde entier qui nous ont fait confiance pour évaluer et examiner leurs manuscrits et les conseiller en vue de la publication de leurs travaux en relation avec cette pandémie : de la compréhension de la structure du virus à l'identification de traitements potentiels à base d'anticorps monoclonaux, en passant par les travaux précliniques et cliniques qui ont conduit à la mise au point de vaccins, jusqu'à la manière dont les différentes politiques de confinement ont affecté les comportements humains et la transmission virale. Rien de tout cela n'aurait été possible sans l'aide de nos relecteurs ; nous leur sommes profondément reconnaissants pour leur temps et leur expertise.

Les équipes de Nature et de ses revues associées ont maintenant publié près de quatre mille articles de recherche sur le SARS-CoV2, le Covid-19 et les sujets qui leur sont associés. Les articles que nous avons publiés ne représentent qu’une petite partie des milliers de soumissions de manuscrits que nous avons reçues sur ce sujet, alors que différentes communautés de chercheurs dans le monde réorientaient leurs recherches pour répondre à l'urgence mondiale posée par le Covid-19. L'évaluation de tous ces articles a nécessité tout le dévouement, l'expertise du domaine et le professionnalisme de nos équipes en interne.

Chaque manuscrit soumis a nécessité une relecture minutieuse afin d'évaluer les perspectives présentées et de vérifier leur pertinence. Ceux qui ont passé ce premier filtre éditorial ont été ensuite évalués par des pairs externes soigneusement sélectionnés par nos rédacteurs, en se fondant sur leur connaissance approfondie du domaine et des communautés de chercheurs. Nos rédacteurs en chef ont travaillé en étroite collaboration avec les auteurs et les ont guidés dans la révision de leurs manuscrits. Le partage rapide des données étant particulièrement important pendant la pandémie, nous avons également fourni un soutien aux auteurs pour les aider à gérer efficacement leurs données. 

De même que de nombreux chercheurs ont réorienté leurs travaux vers l'étude du Covid-19, plusieurs de nos rédacteurs en chef, qui n'auraient normalement pas participé à l'évaluation de ces articles, ont apporté leur aide, en mettant à profit leur expertise en matière de modélisation, d'analyse des données, de médecine translationnelle, de sciences sociales et d'autres sujets pertinents. 

Lors d'une pandémie, les connaissances doivent être partagées rapidement. Nous avons encouragé de manière proactive les auteurs à déposer leurs travaux sur un serveur de preprints. Bien que nous soutenions cette pratique depuis des décennies, nous avons estimé qu'il était particulièrement prioritaire que les recherches liées au Covid-19 soient disponibles sur des serveurs de preprints au moment où elles nous étaient soumises, afin que les nouveaux résultats puissent être examinés ouvertement et immédiatement. Nous avons également conclu un accord avec l'OMS pour partager avec elle toutes les soumissions que nous avons reçues afin de l'aider à suivre les recherches émergentes.

Nous avons travaillé sans relâche pour raccourcir au maximum le délai entre la soumission et la mise à disposition des travaux de recherche évalués par les pairs. Nos collègues éditeurs - dont le travail permet de rendre ces articles lisibles par le plus grand nombre et accessibles sur les nombreuses plateformes et services utilisés par les chercheurs - ont également augmenté la cadence. Notre détermination a rencontré un défi particulier lorsqu'en décembre de l'année dernière, les résultats de recherches sur Omicron, le variant le plus récent du virus, ont commencé à arriver. Alors que beaucoup se préparaient à faire une pause, le 23 décembre a vu la publication en ligne de cinq de ces articles de recherche, le jour même de leur acceptation par la revue Nature.

Dès le début, nous avons mis en libre accès tous nos articles de recherche sur le Covid-19 et, en publiant plus de 150 articles dans la presse, nous avons atteint un public mondial grâce à des dizaines de milliers d'articles d'actualité dans des médias de premier plan. À l'heure où j'écris ces lignes, nous continuons à mettre l'accent sur les recherches liées à Omicron et nous publions ces articles dans les 24 à 48 heures suivant leur acceptation. 

Bien entendu, nous ne nous contentons pas de laisser à d'autres la couverture journalistique de la pandémie. Nous avons conscience de notre responsabilité lorsqu'il s'agit de contribuer à la compréhension de la science par le grand public, l'une des pierres angulaires sur lesquelles Nature a été fondée. Le travail journalistique de Nature, et d'autres titres du portefeuille de Nature tels que Nature Medicine, a joué un rôle important dans notre réponse face à la pandémie et a aidé les scientifiques, les gouvernements et le public à comprendre le SARS-CoV-2 et la pandémie. Nature a publié plus de 700 articles et commentaires rédigés par des experts, qui ont été consultés par des millions de personnes et continuent de faire l'objet de discussions actives sur les médias sociaux.

Dans le cadre de notre engagement à aider les gens à comprendre la pandémie, nous avons également mis à profit les compétences de nos graphistes et de nos journalistes spécialisés dans la représentation des données pour fournir des mises à jour graphiques, pour lesquelles nous avons remporté deux prix prestigieux : pour une infographie expliquant la conception des vaccins et un prix d'illustration éditoriale pour une série sur la science après la pandémie. En outre, notre équipe de podcast Nature a lancé un podcast primé consacré au Covid, Coronapod, afin de faire profiter un large public des dernières découvertes dans le domaine. Nous avons toujours été conscients de la valeur d'un journalisme minutieux et de qualité, et il a été encourageant de voir la demande croissante pour ce type de journalisme tout au long de la pandémie.

Nous avons tous vécu deux années extraordinaires, où tout le monde, les chercheurs, les relecteurs, éditeurs et bien sûr les professionnels de la santé et les soignants, a travaillé et vécu sous tension. Nous continuerons à aider les chercheurs à communiquer leurs travaux les plus importants au public le plus large possible, que ce soit par le biais de nos publications ou de notre travail journalistique. Et nous continuerons à rappeler aux gouvernements et aux décideurs qu'il n'y a qu'un seul moyen de sortir d'une crise mondiale telle que cette pandémie : placer la science au cœur de nos décisions.

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Author: Magdalena Skipper

Editor in Chief, Nature

Magdalena Skipper est généticienne de formation et possède une expérience considérable en matière d'édition et de publication : après avoir débuté au sein de Nature Publishing Group en 2001, elle a été rédactrice en chef de Nature Reviews Genetics, rédactrice principale pour la génétique et la génomique chez Nature, et plus récemment rédactrice en chef des revues partenaires de Nature. Avant de rejoindre Nature en tant que rédactrice en chef, elle était rédactrice en chef de Nature Communications. Elle a étudié la détermination du sexe au MRC Laboratory of Molecular Biology, à Cambridge, au Royaume-Uni, et la signalisation Notch dans l'épithélium intestinal des vertébrés aux laboratoires ICRF (aujourd'hui CRUK), à Londres. Elle est passionnée par le mentorat, la transparence scientifique et la culture de recherche positive. Elle s'intéresse tout particulièrement à l'innovation dans l'édition scientifique.